Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/567

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force d’analyſer des fleurs en croix & d’y voir toujours des inégalités au réceptacle, qu’en les examinant en particulier, on a trouvé que ces glandes appartenoient au plus grand nombre des genres, & qu’on les ſuppoſe par analogie dans ceux mêmes ou on ne les diſtingue pas.

Je comprends qu’on eſt faché de prendre tant de peine ſans apprendre les noms des plantes qu’on examine. Mais je vous avoue de bonne foi qu’il n’eſt pas entré dans mon plan de vous épargner ce petit chagrin. On prétend que la Botanique n’eſt qu’une ſcience de mots qui n’exerce que la mémoire & n’apprend qu’a nommer des plantes. Pour moi, je ne connois point d’étude raiſonnable qui ne ſoit qu’une ſcience de mots ; & auquel des deux, je vous prie, accorderai-je le nom de Botaniſte, de celui qui fait cracher un nom ou une phraſe à l’aſpect d’une plante, ſans rien connoître à ſa ſtructure, ou de celui qui connoiſſant très-bien cette ſtructure ignore néanmoins le nom très-arbitraire qu’on donne à cette plante en tel ou en tel pays ? Si nous ne donnons à vos enfans qu’une occupation amuſante, nous manquons la meilleure moitié de notre but qui eſt, en les amuſant, d’exercer leur intelligence & de les accoutumer à l’attention. Avant de leur apprendre à nommer ce qu’ils voient, commençons par leur apprendre à le voir. Cette ſcience oubliée dans toutes les éducations doit faire la plus importante partie de la leur. Je ne le redirai jamais aſſez ; apprenez-leur à ne jamais ſe payer de mots, & à croire ne rien ſavoir de ce qui n’eſt entré que dans leur mémoire.

Au reſte, pour ne pas trop faire le méchant, je vous nomme