Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t8.djvu/549

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LETTRE D’UN SYMPHONISTE DE L’ACADÉMIE ROYALE DE MUSIQUE, À SES CAMARADES DE L’ORCHESTRE.

Enfin, mes chers Camarades, nous triomphons ; les bouffons sont renvoyés : nous allons briller de nouveau dans les symphonies de Monsieur de Lully, nous n’aurons plus si chaud a l’Opéra ni tant de fatigue a l’orchestre. Convenez Messieurs, que c’etoit un métier pénible que celui de jouer cette chienne de Musique ou la mesure alloit sans miséricorde, & n’attendoit jamais que nous pussions la suivre. Pour moi quand je me sentois observe par quelqu’un de ces maudits habitans du coin de la Reine, & qu’un reste de mauvaise honte m’obligeoit de jouer a-peu-près ce qui etoit sur ma partie, je me trouvois le plus embarrasse du monde, & au bout d’une ligne ou deux, ne fâchant plus ou j’en étois, je feignois de compter des pauses, ou bien je me tirois d’affaire, en sortant pour aller pisser.

Vous ne sauriez croire quel tort nous a sait cette Musique qui va si vite, ni jusqu’ou s’etendoit déjà la réputation d’ignorance