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Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t9.djvu/115

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le corps n’est pas, pour ainsi dire, partagé en une multitude de petites masses qui, ayant des solidités différentes, résonnent conséquemment à différens Tons.

Pourquoi le Bruit ne seroit-il pas du Son, puisqu’il en excite ? Car tout Bruit fait résonner les cordes d’un Clavecin, non quelques-unes, comme fait un Son, mais toutes ensemble, parce qu’il n’y en a pas une qui ne trouvé son unisson ou ses harmoniques. Pourquoi le Bruit ne seroit-il pas du Son, puisqu’avec des Sons on fait du Bruit ? Touchez à la fois toutes les touches d’un Clavier, vous produirez une sensation totale qui ne sera que du Bruit, & qui ne prolongera son effet, par la résonnance des cordes, que comme tout autre Bruit qui seroit résonner les mêmes cordes. Pourquoi le Bruit ne seroit-il pas du Son, puisqu’un Son, trop fort n’est plus qu’un véritable Bruit, comme une Voix qui crie à pleine tête, & sur-tout comme le Son d’une grosse cloche qu’on entend dans le clocher même ? Car il est impossible de l’apprécier, si, sortant du clocher, on n’adoucit le Son par l’éloignement.

Mais, me dira-t-on, d’ou vient ce changement d’un Son excessif en Bruit ? C’est que la violence des vibrations rend sensible la résonnance d’un si grand nombre d’aliquotes, que le mélange de tant de Sons divers fait alors son effet ordinaire & n’est plus que du Bruit. Ainsi les aliquotes qui résonnent ne sont pas seulement la moitié, le tiers, le quart & toutes les consonnances ; mais la septieme partie, la neuvieme, la centieme, & plus encore. Tout cela fait ensemble un effet semblable à celui de toutes les touches d’un Clavecin frappées