Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t9.djvu/562

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Roi Charles dit à ses Chantres : déclarez-nous quelle l’eau la plus pure & la meilleure, celle qu’on prend à la source vive d’une fontaine, ou celle des rigoles qui n’en découlent que de bien loin ? Ils dirent tous que l’eau de la source étoit la plus pure & celle des rigoles d’autant plus altérée & sale qu’elle venoit de plus loin. Remontez donc, reprit le Seigneur Roi Charles, à la fontaine de Saint Grégoire dont vous avez évidemment corrompu le Chant. Ensuite le Seigneur Roi demanda au Pape Adrien des Chantres pour corriger le Chant François, & le Pape lui donna Théodore & Benoit, deux Chantres très-savans & instruits par Saint Grégoire même : il lui donna aussi des Antiphoniers de Saint Grégoire qu’il avoir notés lui-même en Note Romaine. De ces deux Chantres, le Seigneur Roi Charles, de retour en France, en envoya un à Metz & l’autre à Soissons, ordonnant à tous les Maîtres de Chant des Villes de France de leur donner à corriger les Antiphoniers, & d’apprendre d’eux à Chanter. Ainsi surent corrigés les Antiphoniers François que chacun avoir altérés par des additions & retranchemens à sa mode, & tous les Chantres de France apprirent le Chant Romain, qu’ils appellent maintenant Chant François ; mais quant aux Sons tremblans, flattés, battus, coupés dans le Chant, les François ne purent jamais bien les rendre, faisant plutôt des chevrottemens que des roulemens, à cause de la rudesse naturelle & barbare de leur gosier. Du reste, la principale école de Chant demeura toujours à Metz, & autant le Chant Romain surpasse celui de Metz, autant le