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��INTRODUCTION 93

théories politiques ne rencontraient pas beaucoup plus de laveur dans les partis avancés ni dans les diverses écoles philosophiques. Quelques-uns des anciens socia- listes français d'avant 1848 se sont bien réclamés de ses doctrines ; par exemple, Pierre Leroux (*), Louis Blanc, les apôtres de la « fraternité », qui opposent le « senti- ment » de Rousseau à la froide « raison »de Voltaire ( 2 ). Mais ni les Positivistes, — car, malgré plus d'une ana- logie dans les idées, la différence des méthodes est si grande qu'ils n'ont que défiance pour la « métaphy- sique » du Contrat, — ni même, en général, les Saint- Simoniens, dont les vues économiques sont tout autres, — ni les socialistes modernes, quelques-uns, comme Proudhon ( 3 ), à qui conviendrait mieux peut-être le

(*) Revue sociale, 1845, t. I, p. 109.

(*) L. Blanc, Hist de la RévoL, t. II, IX, v.

( 3 ) P.-J. Proudhon a fait du Contrat social une très inté- ressante critique, violente, injuste et haineuse i mais en quel- ques parties solide et profonde, dans son Idée générale de la Révolution au IVI e siècle, IV, 1 (p. 115-125). Avec Benjamin Constant, mais dans un camp tout opposé, il est le plus sérieux adversaire de Rousseau. Il lui reproche de n'avoir pas établi d'abord une théorie juridique, solide et précise du Contrat selon les principes du Droit : le contrat social de Rousseau n'est qu' « un acte constitutif d'arbitres » ; on peut le comparer « à un traité de commerce dans lequel auraient été supprimés les noms des parties, l'objet de la convention, la nature et l'im- portance des valeurs, produits et services pour lesquels on devrait traiter,... tout ce qui fait, en un mot, la matière des contrats, et où l'on ne serait occupé que de pénalités et de juri- dictions. » Rousseau s'inquiète uniquement de « la protection et la défense des biens et des personnes », mais il néglige l'essen- tiel^ savoir le mode d'acquisition et de transmission des biens, le travail, l'échange, la valeur, le prix des produits, etc. : « son programme parle exclusivement de droits politiques ; il ne reconnaît pas de droits économiques ». Ce « pacte de haine », ce « serment de guerre sociale », réorganise la tyrannie, en la faisant dériver du peuple. « Après avoir fait, sous le titre déce- vant de Contrat social, le code de la tyrannie capitaliste et mercantile, le charlatan genevois conclut à la nécessité du pro- létariat, à la subalternisation du travailleur, à la dictature et à l'inquisition. »

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