Page:Rousseau - Du Contrat social éd. Beaulavon 1903.djvu/247

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LIVRE TROISIÈME T.'5'j

Or, cet excédent n'est pas le même dans tous les pays du monde. Dans plusieurs il est considérable, dans d'autres médiocre, dans d'autres nul, dans d'autres négatif. Ce rapport dépend de la fertilité du climat, de la sorte de travail que la terre exige, de la nature de. ses productions, de la force de ses habitants, de la plus ou moins grande consomma- tion qui leur est nécessaire, et de plusieurs autres rapports semblables desquels il est composé.

D'autre part, tous les gouvernements ne sont pas de même nature : il y en a de plus ou moins dévo- rants ; et les différences sont fondées sur cet autre principe, que, plus les contributions publiques s'éloignent de leur source, et plus elles sont oné- reuses. Ce n'est pas sur la quantité des impositions qu'il faut mesurer cette charge, mais sur le chemin qu'elles ont à faire pour retourner dans les mains dont elles sont sorties ('). Quand cette circulation est prompte et bien établie, qu'on paye peu ou beau- coup, il n'importe, le peuple est toujours riche et les finances vont toujours bien. Au contraire, quelque peu que le peuple donne, quand ce peu ne lui revient point, en donnant toujours, bientôt il s'épuise: l'Etat n'est jamais riche et le peuple est toujours gueux.

Il suit de là que plus la distance du peuple au gouvernement augmente, et plus les tributs devien- nent onéreux : ainsi, dans la démocratie, le peuple est le moins chargé ; dans l'aristocratie, il l'est davantage ; dans la monarchie, il porte le plus

(') Si tout l'impôt recueilli est en effet dépensé en vue de l'intérêt public, l'impôt fait retour au citoyen sous la forme de services indispensables. Ce n'est donc pas s'appau- vrir que de payer l'impôt.

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