Page:Rousseau - Du contrat social éd. Dreyfus-Brisac.djvu/116

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» LIVRE U. — CHAP. Iv. 5g et le pouvoir supréme. Tant que les sujets ne sont soumis qu’a de telles conventions, ils n’obéissent it personne, mais seulement 5. leur propre volonté : et demander jusqu’oi1 s’étendent les droits respectifs du souverain et des citoyens, c’est demander jusqu’a quel point ceux-ci peuvent s’engager avec eux-mémes, chacun envers tous, et tous envers chacun d’eux. On voit par la que le pouvoir souverain, tout absolu, tout sacré, tout inviolable qu’il est, ne passe ni ne peut passer les bornes des conventions générales, et que tout homme peut disposer pleinement de ce qui lui a été laissé de ses biens et de sa liberté par ces conventions; de sorte que le souverain n’est jamais en droit de charger un sujet plus qu’un autre, parce qu’alors, l’aifaire devenant particu- liére, son pouvoir n’est plus compétent. . Ces distinctions une fois admises, il est si faux que dans le contrat social il y ait de la part des particuliers aucune renonciation véritable, que leur situation, par l’effet de ce contrat, se trouve réellement préférable at ce qu’elle était auparavant, et qu’au lieu d’une aliénation ils n’ont fait qu’un échange avantageux d’une maniére d’étre incertaine et précaire contre une autre meilleure et plus sure, de l’in— dépcndance naturelle contre la liberté, du pouvoi r de nuire 5 autrui contre leur propre sureté, et de leur force, que d’autres pouvaient surmonter, contre un droit que l’union sociale rend invincible. Leur vie meme, qu’ils ont dévouée a l’l’£tat, en est continuellement `protégée; et lorsqu’ils Pexposent pour sa défense, que font-ils alors que lui ren- dre ce qu’ils ont regu de lui? Que font-ils qu’ils ne iissent plus fréquemment et avec plus de danger dans l’état de nature, lorsque, livrant des combats inévitables, ils défen- draient au péril de leur vie ce qui leur sert a la conserver? Tous ont a combattre au besoin pour la patrie, il est vrai; mais aussi nul n’a jamais a combattre pour soi. Ne gagne- t·on pas encore a courir, pour ce qui fait notre sureté, une