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260 DU CONTRAT SOCIAL. eux, soit également, soit selon certaines proportions établies par le souverain. Mais de quelque maniere que se fasse cette acquisition, le droit que chaque particulier a sur son propre bien est touiours subordonné au droit que la communauté a sur tous, sans quoi il n’y aurait ni solidité dans le lien social, ni force réelle dans l’exercice de la souveraineté. Je terminerai ce chapitre par une remarque (1) qui doit servir de base a tout le systéme social : c’est qu’au lieu de détruire l’égalité naturelle, le pacte fondamental substitue au contraire une égalité morale et légitime a ce que la nature avait pu mettre d’inégalité physique entre les hommes, et que,pouvant naturellement étre inégaux en force ou en génie, ils deviennent tous égaux par convention et de droit.] CHAPITRE IV an quot CONSISTE(2) LA souvmumnré ¤·r(3) cz Qur ut neun INALIENABLE (a) [ll y a donc dans l’Etat une force commune qui le soutient, une volonté générale qui dirige cette force, et c’est l’application de l’une a l’autre qui constitue la souveraineté. Par ou l’on voit que le souve- rain n’est par sa nature qu’une personne morale, qu’il n’a qu’une existence abstraite et collective, et que l’idée qu’on attache a ce mot ne peut étre unie a celle d’un simple individu. Mais comme c’est ici une proposition des plus importantes en matiére de droit politique, tachons de la mieux éclaircir. Je crois pouvoir poser pour une maxime incontestable que la volonté générale peut seule diriger les forces de 1’Etat selon la fin de son institution, qui est le bien commun : car si l’opposition des intéréts particuliers a rendu nécessaire l’établissement des sociétés civiles, c’est l’acc0rd de ces mémes intéréts qui l’a rendu possible. C’est ce qu’il y a de commun dans ces différents intéréts qui forme ‘ le lien social, et s’il n’y avait pas quelque point dans lequ_el tous les intéréts s’accordent, la société ne saurait exister. Or, comme la volonté tend toujours au bien de l’étre qui veut, que la volonté par- ticuliére a toujours pour objet 1’intérét privé, et la volonté générale l’intérét commun, il s’ensuit que cette derniére est ou doit étre seule le vrai mobile du corps social. Je conviens qu’on peut mettre en doute si quelque volonté parti- culiére ne saurait s’accorder en tout avec la volonté générale, et par conséquent, supposé qu’une telle volonté particuliére existat, si l’on (1) lmportante en maziére de droit politique, (2) Ce que c’est que. (3) Qu’elle est. (a) Le morceau entre crochets a passe dans Ie Contra! social, liv. Il, chap. r. I