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Les Exploits d’Iberville

ché dans mon cadre, tu délirais, et sous l’empire de la fièvre tu m’as révélé des…

— Je délirais ! interrompit brusquement le jeune homme, ce que j’ai dit ne doit donc avoir aucune signification.

— Peut-être… Mais pourquoi ces serments de vengeance dans ton délire contre un nom que tu portes ?

— Ai-je ainsi parlé ? demanda le jeune homme en relevant la tête ?

— Urbain, rends-moi cette justice que depuis six années que tu sers sous mes ordres, je t’ai toujours traité avec une tendresse égale à celle d’un père ; que je n’ai négligé aucune occasion d’aider à ton avenir. Répondras-tu à ces sentiments par une défiance que rien ne justifie ? Serais-tu ingrat ? Ce n’est pas une vaine curiosité qui me guide : tu souffres et je voudrais connaître la cause de tes chagrins pour y apporter du soulagement.

L’hôtesse entrait en ce moment et déposa sur la table une bouteille et deux verres en attendant le dîner, qui fut servi quelques instants après. Aussitôt qu’elle se fut retirée, le jeune homme passa la main sur son front comme pour en chasser une pensée pénible, puis relevant la tête et regardant d’Iberville bien en face :

— Capitaine, dit-il, vous avez raison, le moment est venu de parler. Aussi bien, j’ai besoin de verser dans un cœur qui m’aime le secret de mes chagrins. Après l’intérêt que vous m’avez montré, ce serait en