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Les Exploits d’Iberville

entendre. Mais vous m’entendrez, mademoiselle, vous me verrez, et ce qu’il y a de mieux, vous me regarderez.

Ce soliloque achevé, il soulève légèrement son chapeau, branle un peu la tête et le laisse tomber dans la rue. Il s’empresse de crier au passant de le ramasser ; deux ou trois gamins accourent, les voisins se mettent sur le seuil de leur porte, un chien aboie, puis un second, puis un troisième, et en un moment, Urbain se trouve l’auteur et l’objet d’un tumulte aussi bête que favorable à ses projets.

Enfin le bienheureux chapeau est rapporté, Urbain s’en coiffe aux yeux de tous ses voisins qui admirent sa toilette. Sûr alors d’être remarqué, il relève la tête avec grâce et tourne son regard vers la fenêtre de la mère Sauvageau…

Les chants avait cessé et la fenêtre était fermée.

— Décidément, je n’ai pas de chance ! soupira le jeune homme avec dépit en fermant lui-même sa fenêtre.

Il s’assit et se mit à réfléchir. Or le résultat de ses réflexions fut qu’il avait deux paires de manchettes à sabots à faire blanchir. Qu’y a-t-il dans ce cas de plus naturel que de donner ces deux paires de manchettes à la blanchisseuse qui demeure en face ?

Au moment où il traversait la rue, il aperçut la mère Sauvageau qui détournait le coin portant un paquet.