Page:Rousseau - Les exploits d'Iberville, 1888.djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
17
Les Exploits d’Iberville

le firent appeler. « Tout nous autorise à te traiter en ennemi, lui dirent-ils, mais nous ne pouvons nous y résoudre. Nous te connaissons trop ; ton cœur n’a point eu de part à l’insulte qu’on nous a faite ; et il serait injuste de te punir d’un crime que tu détestes autant que nous. Mais il faut que tu nous quittes. Tout le monde ici ne te rendrait pas justice. Quand les jeunes gens auront entonné le chant de guerre, ils ne verront plus en toi qu’un perfide qui a livré nos chefs à un dur et honteux esclavage ; ils n’écouteront plus que leur colère, et nous ne serions plus les maîtres de te soustraire à leurs coups. »

À la tête de deux mille sept cents hommes, M. de Denonville marcha contre les cinq cantons, battit les Tsonnontouans et réduisit leurs villages en cendres. Mais au lieu de profiter de sa victoire, il retraita, laissant derrière lui un ennemi puissant n’attendant que l’occasion de prendre une éclatante revanche.

Un calme trompeur régna ensuite dans la colonie ; mais la tempête s’amoncelait et allait éclater bientôt, répandant partout une terreur profonde.

C’était donc, comme nous l’avons dit au commencement de ce chapitre, la veille du cinq août 1689. Il avait fait une chaleur étouffante tout le jour. Vers le soir, de gros nuages noirs, précurseurs d’un orage prochain, roulaient à l’horizon.

Trois personnes, avec lesquelles nous allons faire connaissance, se dirigeaient vers un canot d’écorce retenu au rivage par un jeune sauvage huron, à l’en-