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Les Exploits d’Iberville

ment nous échappe aussi, car il doit y avoir là d’autres vaisseaux anglais. Donc, le Pélican est pris entre deux feux.

— Cré mille millions de carcasses !… et dire qu’ils sont trois !…

— Donc, poursuivit d’Iberville, avec un calme superbe en telle occurrence, le navire peut-il lutter ?

Ses deux interlocuteurs gardèrent un silence solennel, que troublait seul les vagues en courroux se brisant sur la carène du vaisseau et le sifflement du vent dans les cordages.

— Le navire peut-il lutter ? reprit le commandant. Voyons, parlez sans crainte, mes amis, je vous y invite, je vous le commande au besoin… Vous, d’abord, Urbain, qui représentez l’état-major ; toi, Cacatoès, réponds au nom de l’équipage. Vous connaissez la situation, que reste-t-il à faire ?

— Mon commandant, dit l’officier ainsi interpellé, je vais vous dire, puisque vous me l’ordonnez, ma pensée toute entière : dans mon âme et conscience, je crois que le navire n’a aucune chance de salut.

— Quoi ? s’écria le vieux matelot, oubliant tout respect et saisissant le poignet du jeune officier, le Pélican se laissera amariner sans lutter ? Il baissera son pavillon devant l’Anglais comme un failli chien… Oh ! mon commandant !…

D’Iberville bondit sur le vieux matelot qu’il saisit à la gorge.