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Les Exploits d’Iberville

la mer. Voici la partie que je lui ai cachée. Et prenant son livre de bord, il lut les lignes suivantes :

« Je ne veux pas qu’un vaisseau placé sous mes ordres tombe au pouvoir des Anglais ; c’est pourquoi je suis résolu, au dernier moment, de me faire sauter avec tout mon équipage. Au commencement de l’action, je place Cacatoès, un vieux brave, dans la sainte-barbe, chargé de mettre le feu aux poudres. »

Un éclair d’orgueil passa dans les petits yeux du matelot. Les gladiateurs romains saluant César avant d’entrer dans l’arène s’écriaient : « Morituri te salutant ! » Cacatoès se contenta de dire, paroles sublimes dans sa bouche dans un tel moment :

— Merci bien, mon commandant !….

— Viens, ajouta d’Iberville.

Ouvrant alors la porte de la cabine qui lui servait de chambre à coucher, il y pénétra suivi du matelot, enleva deux planches du tillac et montrant l’ouverture :

— C’est par là, dit-il, que je puis descendre à la soute aux poudres. Tu vas t’asseoir sur ce coffre, et dès que tu entendras les premiers coups de canon, tu allumeras ta pipe. M’as-tu bien suivi ?

— Oui, mon commandant.

— Bien. Dès que les canons auront fini de parler, tu secoueras les cendres chaudes de ta pipe au-dessus de cette ouverture. As-tu compris ?

— Mon commandant…