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Les Exploits d’Iberville

une précision, un ensemble, qu’on les aurait crus à bord d’un vaisseau-école dans le port de Brest.

— Envoie à virer ! retentit de nouveau au milieu du sifflement du vent dans les cordages, la voix d’Iberville.

Le vaisseau vint dans le vent avec la docilité d’un cheval de cirque, fit son abattée et prit sa course à la poursuite du Hampshire qu’il rangea sous le vent.

— Pointez à couler bas ! jusqu’à la gueule ! feu !

Ce commandement avait à peine retenti, qu’un nuage de fumée enveloppa le Pélican, tandis que la membrure du vaisseau était secouée dans toutes ses parties.

Aussitôt que le vent eût dissipé la fumée, l’équipage aperçut le navire anglais qui plongeait de l’avant, puis de l’arrière, puis tournait sur lui-même comme un chien qui court après sa queue, puis plus rien qu’une immense clameur qui s’éteignit bientôt dans les flots.

La mer venait de se refermer pour toujours sur le Hampshire englouti avec tout son équipage.

Le coup avait été si prompt, que les marins du Pélican restèrent mornes et sombres. Pas une seule acclamation, pas un cri de victoire !

C’est que, eût-on donné la mort toute sa vie, on ne voit pas stoïquement disparaître ainsi son semblable sans que de terribles réflexions se présentent au cœur et à l’esprit.