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Les Exploits d’Iberville

campagnes avait beaucoup vu et partant avait beaucoup à raconter. Ajoutons que cette qualification de beau parleur que nous lui avons entendu donner par Kernouët n’était nullement usurpée.

Nous allons donc lui laisser la parole, tout en regrettant de ne pouvoir rapporter entièrement le pittoresque de son langage.

Portant le revers de sa main droite à sa bouche, Cacatoès lança derrière lui un long jet de salive noirâtre, puis après avoir toussé, essuyé sa bouche avec sa manche, il commença son récit en ces termes :

« C’est bien à vous, mes vieux, d’aimer le commandant d’Iberville ; car, lui et ses frères,[1] ce sont de braves marins, pas fiers du tout avec le matelot, et ne boudant jamais devant l’ennemi.

« Pour lors, les Canadiens s’étaient bourlingués bravement jusque chez l’anglais où ils avaient détruit Collaer de fond en comble[2].

« Et tenez, le lieutenant Urbain en était, que je

  1. D’Iberville avait sept frères. Sa famille était originaire de Normandie. « Ces huit frères, que l’on peut appeler huit héros, dit M. Léon Guérin, avaient nom : LeMoyne d’Iberville, LeMoyne de Sainte-Hélène, LeMoyne de Maricourt, LeMoyne de Longueil, LeMoyne de Sérigny, LeMoyne de Châteauguay, et les deux LeMoyne de Bienville. Le premier fut l’un des plus grands marins à la fois et l’un des plus habiles navigateurs que la France ait jamais eus. »
  2. Schenactady, que les Français appelaient Collaer, du nom de son fondateur, un marchand hollandais.