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Page:Rousseau - Marceline, 1944.djvu/21

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MARCELINE.

pour ma part, je préfère les garçons. Mais une petite fille a son charme. Si la tienne te ressemble, ce sera tout à fait délicieux.

— J’aime mieux qu’elle ressemble à Octave. Octave est bien mieux que moi.

— Tu trouves ? Oui, au fait, c’est possible… il a des traits plus réguliers — mais la physionomie… En tous cas, tu n’as pas à craindre un laideron, et c’est déjà beaucoup. À propos, qu’en dit ton mari ? Est-il enchanté ?

— Enchanté.

— À la bonne heure ! Et la belle-maman ? Enchantée aussi ? Allons ! tout va bien. Voilà peut-être ce qui va mettre de l’huile aux gonds et rabibocher ton ménage. J’ai toujours pensé à part moi qu’il ne vous manquait qu’un enfant pour être les gens les plus heureux du monde. Maintenant, tu vas voir, tout marchera comme sur des roulettes.

Mademoiselle Anna se frottait les mains et elle regardait Laure avec un sourire satisfait. L’optimisme et la bienveillance formaient les éléments essentiels de sa bonne humeur. Et puis elle aimait cette jeune femme et elle aurait voulu la voir heureuse.

— Figure-toi, dit-elle en écartant sa tasse pour mieux s’appuyer sur la table, que j’ai passé toute la journée d’hier à faire des rangements. J’ai fouillé dans un tas de vieilles nippes et de vieux papiers. Et j’ai retrouvé des choses extraordinaires ! Entre autres une lettre de ton père m’annonçant ta naissance. Il faudra que je te montre cela.

— Une lettre écrite il y a trente ans ! Que cela doit être émouvant à relire !

— J’en ai trouvé de plus anciennes… de maman, de mes sœurs… jusqu’à un billet de ta belle-mère, daté du 6 juillet 1880, où elle m’invite à un pique-nique. Pourquoi ai-je gardé cela, je me le demande !