Page:Rousseau - Philosophie, 1823.djvu/122

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’atteste-t-elle pas que les sciences ont contribué partout au bonheur des hommes, à la gloire des empires ; au triomphe de la vertu !

Non, ce n’est pas des sciences, c’est du sein des richesses que sont nés de tout temps la mollesse et le luxe ; et, dans aucun temps, les richesses n’ont été l’apanage ordinaire des savants. Pour un Platon dans l’opulence, un Aristippe accrédité à la cour, combien de philosophes réduits au manteau et à la besace, enveloppés dans leur propre vertu et ignorés dans leur solitude ! combien d’Homères et de Diogènes, d’Epictètes et d’Ésopes, dans l’indigence ! Les savants n’ont ni le goût ni le loisir d’amasser de grands biens. Ils aiment l’étude ; ils vivent dans la médiocrité ; et une vie laborieuse et modérée, passée dans le silence de la retraite, occupée de la lecture et du travail, n’est pas assurément une vie voluptueuse et criminelle. Les commodités de la vie, pour être souvent le fruit des arts, n’en sont pas davantage le partage des artistes ; ils ne travaillent que pour les riches, et ce sont les riches oisifs qui profitent et abusent des fruits de leur industrie.

L’effet le plus vanté des sciences et des arts, c’est, continue l’auteur, cette politesse introduite parmi les hommes, qu’il lui plaît de confondre avec l’artifice et l’hypocrisie ; politesse, selon lui, qui ne sert qu’à cacher les défauts et à masquer les vices. Voudrait-il donc que le vice parût à découvert, que l’indécence fût jointe au désordre et le scandale au crime ? Quand, effectivement, cette