fortes branches ? S’il avait eu une fronde, lancerait-il de la main une pierre avec tant de roideur ? s’il avait eu une échelle, grimperait-il si légèrement sur un arbre ? s’il avait eu un cheval, serait-il si vite à la course ? Laissez à l’homme civilisé le temps de rassembler toutes ses machines autour de lui, on ne peut douter qu’il ne surmonte facilement l’homme sauvage : mais si vous voulez voir un combat plus inégal encore, mettez-les nus et désarmés vis-à-vis l’un de l’autre, et vous reconnaîtrez bientôt quel est l’avantage d’avoir sans cesse toutes ses forces à sa disposition, d’être toujours prêt à tout événement, et de se porter, pour ainsi dire, toujours tout entier avec soi (Note 6).
Hobbes prétend que l’homme est naturellement intrépide, et ne cherche qu’à attaquer et combattre. Un philosophe illustre pense, au contraire, et Cumberland et Puffendorf l’assurent aussi, que rien n’est si timide que l’homme dans l’état de nature, et qu’il est toujours tremblant et prêt à fuir au moindre bruit qui le frappe, au moindre mouvement qu’il aperçoit. Cela peut être ainsi pour les objets qu’il ne connaît pas ; et je ne doute point qu’il ne soit effrayé par tous les nouveaux spectacles qui s’offrent à lui toutes les fois qu’il ne peut distinguer le bien et le mal physiques qu’il en doit attendre, ni comparer ses forces avec les dangers qu’il a à courir ; circonstances rares dans l’état de nature, où toutes choses marchent d’une manière si uniforme, et où la face de la terre n’est point sujette à ces changements brusques et continuels