Page:Rousseau - Philosophie, 1823.djvu/95

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5° Si je voulais répondre à la première partie de la réfutation, ce serait le moyen de ne jamais finir. M.  Gautier juge à propos de me prescrire les auteurs que je puis citer, et ceux qu’il faut que je rejette. Son choix est tout-à-fait naturel ; il récuse l’autorité de ceux qui déposent pour moi, et veut que je m’en rapporte à ceux qu’il croit m’être contraires. En vain voudrais-je lui faire entendre qu’un seul témoignage en ma faveur est décisif, tandis que cent témoignages ne prouvent rien contre mon sentiment, parce que les témoins sont parties dans le procès ; en vain le prierais-je de distinguer dans les exemples qu’il allègue ; en vain lui représenterais-je qu’être barbare ou criminel sont deux choses tout-à-fait différentes, et que les peuples véritablement corrompus sont moins ceux qui ont de mauvaises lois que ceux qui méprisent les lois. Sa réplique est aisée à prévoir : Le moyen qu’on puisse ajouter foi à des écrivains scandaleux, qui osent louer des barbares qui ne savent ni lire ni écrire ? Le moyen qu’on puisse jamais supposer de la pudeur à des gens qui vont tout nus, et de la vertu à ceux qui mangent de la chair crue ? Il faudra donc disputer. Voilà donc Hérodote, Strabon, Pomponius-Méla aux prises avec Xénophon, Justin, Quinte-Curce, Tacite ; nous voilà dans les recherches des critiques, dans les antiquités, dans l’érudition. Les brochures se transforment en volumes, les livres se multiplient, et la question s’oublie. C’est le sort des disputes de littérature, qu’après des in-folio d’éclaircissements on finit