Page:Roussel - Idées religieuses et sociales de l’Inde ancienne.djvu/31

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estimables, ô Yudhiṣṭhira ; cependant ils ne les prennent point comme enjeu, par commisération pour elles. Les riches présents du roi de Kâçî, les dons précieux, les joyaux apportés par les autres monarques, tes attelages, tes trésors, tes cuirasses, tes armes, ton royaume, ta personne et les nôtres, nos adversaires se sont emparés de tout par adresse. Toutefois, ce n’est point ce qui m’irrite, car tu étais le maître de nous tous ; mais j’estime que tu as commis un acte barbare, en jouant Draupadi. Cette jeune femme ne méritait pas un pareil traitement. Parce qu’elle appartenait aux Pâṇḍavas, elle fut persécutée, à ton sujet, par les Kurus, ces misérables qui ne cherchent qu’à nuire, dans leur perversité. À cause de Draupadî ma colère s’allume contre toi, ô prince. Je vais te brûler les deux bras. Sahadeva, apporte-moi du feu »[1].

Arjuna parvint à modérer la fureur de son frère.

Dans cette circonstance, Draupadî qui se lamentait de se voir tombée au pouvoir des Kurus, posa un cas de jurisprudence ou mieux une question de droit naturel assez intéressante.

Yudhiṣṭhira, en jouant aux dés avec Çakuni, le fils de Subala, perdit successivement toutes ses richesses, son royaume, la liberté de ses frères et la sienne propre. Il ne lui restait plus que Draupadî ; c’était son dernier enjeu ; il le perdit encore[2].

On vint apprendre à l’infortunée princesse ce qui s’était passé. Elle dit au prâtikâmin, c’est-à-dire au messager qui lui apportait la nouvelle, de la part de Duryodhana :

« Va trouver ce joueur[3], au milieu de l’assemblée[4],

  1. LXVIII, 1-6.
  2. LXV.
  3. Yudhiṣṭhira
  4. Sabhâ : cette assemblée royale donne son nom au livre.