Page:Roussel - Impressions d Afrique (1910).djvu/119

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lamentable de la malade, immobilisée par un coup de fouet.

Appelant à son aide Hector et Tommy Boucharessas, l’habile médecin, avec mille précautions, souleva l’infortunée, qui fut transportée à l’écart afin de recevoir tous les soins désirables.

Au moment de l’accident, Talou, comme pour éviter toute interruption dans le spectacle, avait donné discrètement quelques ordres à Rao.

Couvrant tout à coup les cris lointains de la pauvre Olga, un chœur immense retentit, formé de voix d’hommes graves et vibrantes.

À ce bruit, chacun se retourna vers le côté ouest, devant lequel les guerriers noirs, accroupis près de leurs armes déposées sur le sol, chantaient tous la Jéroukka, sorte d’épopée orgueilleuse enfantée par l’empereur, qui avait pris pour sujet le récit de ses propres exploits.

L’air, de rythme et de tonalité bizarres, se composait d’un seul motif assez court, indéfiniment reproduit avec des paroles toujours nouvelles.

Les chanteurs scandaient chaque couplet par des battements de mains réglés avec ensemble, et une impression assez grandiose se dégageait de cette glorieuse complainte, dont l’exécution ne manquait ni d’ampleur ni de caractère.