Page:Roussel - Impressions d Afrique (1910).djvu/425

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de faire provision. Le jeune homme put dès lors occuper ses loisirs en modelant, avec sa facilité habituelle, de charmantes statuettes délicieusement campées, qui une fois séchées au soleil prenaient la consistance et l’aspect de la terre cuite. Talou, s’intéressant manifestement à ces travaux artistiques, semblait élaborer quelque projet dont une circonstance fortuite amena bientôt la complète maturité.

Depuis que nous séjournions à Éjur, diverses bêtes de boucherie, embarquées sur le Lyncée pour être abattues en cours de route, avaient contribué tour à tour à notre alimentation. Grâce au maître-coq parcimonieux, fort ménager de cette précieuse réserve, il restait encore plusieurs veaux appelés à subir le sort de leurs compagnons. Le prévoyant cuisinier se décida enfin à entamer ce groupe de survivants et nous servit un soir à dîner, en même temps que les tranches appétissantes de la première victime, un plat de mou finement assaisonné. Talou, qui par instinctive curiosité s’était toujours montré friand de nos mets européens, goûta soigneusement cette dernière préparation, dont il voulut aussitôt connaître la provenance et l’aspect naturel.

Le lendemain, Sirdah, triste et angoissée, vint nous trouver de la part de son père, dont elle