Page:Roussel - La Doublure, 1897.djvu/193

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Et tournent enfermant dans leur cercle une grosse
Femme en domino rouge et vert foncé qui hausse
Les épaules, prenant un gros air mécontent ;
Elle croise les bras et toute rouge attend,
Immobile, ayant l’air de rager, qu’on la laisse
S’en aller ; puis voulant essayer, elle baisse
La tête, pour tâcher de passer sous deux bras ;
Les pierrots aussitôt mettent leur main plus bas
Devant sa tête, afin d’empêcher qu’elle sorte ;
Elle ressaye en vain ; sa figure très forte
De face, a cependant un assez fin profil ;
Le groupe recommence éternellement : « Qu’il
Fait bon, fait bon, fait bon, » sur la phrase pareille
Toujours plus fort ; la femme en se bouchant l’oreille
Grimace avec les yeux ; chaque fois pour finir
Ils disent sans changer rien : « Qu’il fait bon dormir. »
À la fin, au moment où la phrase s’achève
Justement sur « dormir » un d’eux s’arrête et lève
Le bras, laissant passer la femme par-dessous ;
Puis ils repartent tous vite, comme des fous,