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Page:Roussel - La Vue, 1904.djvu/167

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Mange beaucoup de place ; il est lourd, imposant,
Prétentieux et d’un voisinage écrasant ;
Il s’avance de face ; il est mû par deux roues
Trempant des deux côtés. Un homme aux grosses joues
Circule, les mains dans les poches, sur le pont ;
Il paraît bon enfant, sympathique, tout rond,
Mais son laisser-aller visible est hypocrite ;
Avec sa graisse il n’a pas un profond mérite
À tromper les naïfs, car son extérieur
Ne pourrait être plus attirant ni meilleur ;
En voyant sa bedaine ample et sa bonhomie,
On est conduit à lui tendre une main amie,
À sourire de ses jeux de mots ; sur-le-champ
On sent qu’il est dans vos tracés, dans votre camp,
Qu’il veut embrasser vos intérêts, qu’il est apte
À vous servir pour son propre plaisir ; il capte
L’estime, mais sous ses accommodants dehors
Il recèle un esprit ténébreux et retors ;
Il est dangereux, traître, astucieux, perfide ;
Le gros scandale est son affaire ; il est avide