Page:Roussel - La Vue, 1904.djvu/217

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De la façon la plus traîtresse, dans son jeu ;
Près de sa propre boule instable et qu’elle serre
Sous son pied, elle a mis celle de l’adversaire,
Et compte qu’elle ira loin, grâce au seul bienfait
Du contre-coup dont elle attend un grand effet ;
Elle voudrait, la boule allant flâner au diable,
Que le cas du joueur soit irrémédiable,
Qu’il perde en même temps toute chance de gain
Et tout courage pour reprendre du terrain.
À quelques pas, celui qu’elle trouble et maltraite
Se donne une figure imbécile et défaite ;
Il sanglote comme un idiot et se rend
Volontairement laid et ridicule ; il prend
Des manières et des poses d’enfant qui pleure,
Et, feignant d’essuyer une larme, il effleure
L’extrémité de sa paupière avec son doigt ;
Il s’agite pour qu’on le regarde ; il se croit
Désopilant dans son attitude impayable,
Alors qu’en somme il est purement pitoyable
Et ne provoque qu’un silence universel.