Page:Roussel - La Vue, 1904.djvu/225

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S’appuie, en s’embarquant à son tour, sur la main
Qu’il lui tend avec force ; il est poseur et vain,
Ne tarit pas sur ses innombrables conquêtes,
Raconte comment il tourne toutes les têtes ;
Il prend, en parlant des femmes, le ton railleur
Des blasés, perd beaucoup de temps chez le tailleur,
Fait des effets de torse à chaque promenade.
Il aime les gants clairs, se met de la pommade,
Offre le type du parfait garçon coiffeur
Tout reluisant pour son dimanche ; il est gaffeur,
S’entend comme pas un à lâcher une bourde
En criant, comme si l’assemblée était sourde ;
Il se lance gaîment, met les pieds dans le plat
Avec confiance en lui-même, avec éclat,
Et plus on rit de son impair plus il patauge,
S’imaginant qu’il a du succès ; on le jauge
Du premier coup, tant son port est celui d’un sot.
Il ne peut jamais rien comprendre à demi-mot,
Ignore encore l’art de lire entre les lignes,
Reste ébaubi devant les gros yeux et les signes ;