Page:Roussel - La Vue, 1904.djvu/71

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De l’insondable champ, de l’immense surface
Qu’elle trouve de tous côtés et qu’elle embrasse ;
Le vent plus lancinant, plus incessant, plus fort
En cet endroit qu’à tout autre, agite le bord
Du chapeau de la femme ; en effet, la souplesse
De sa paille s’y prête, et la femme le laisse
Vibrer à l’aise, sans le tenir ni bouger ;
L’homme, moins patient, préfère s’insurger
Contre les coups de vent et contre la menace
De perdre son chapeau ; faisant une grimace,
Il prend un air bougon, sombre, il est mécontent
Que les souffles constants, rageurs, s’acharnent tant ;
Le vent perpétuel l’exaspère, l’énerve,
Une appréhension le domine ; il conserve
Sa main sur son chapeau, l’appuyant pour le cas
D’un souffle inattendu, brusque ; il donne le bras
À la femme qui suit sa rêverie heureuse.