Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/151

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Mais la superstition préservait Pizzighini de toutes représailles, et l’on ne tenta rien contre celui qui, pareil à un fétiche, pouvait encore, suivant la conviction unanime, provoquer à l’avenir quantité de beaux rendements agricoles. On se promit seulement de faire espionner de plus près dorénavant la venue du suintement vermeil.

Le nain, riant sous cape, continua donc de dilapider effrontément au grand jour, pendant que tout le pays agonisait, les biens acquis par sa fourberie.

Cependant sa pâleur et son épuisement demeuraient extrêmes, et c’est avec l’apparence d’un spectre qu’il se livrait, selon sa coutume, à de continuelles orgies.

L’année suivante, à l’ordinaire échéance vernale, Pizzighini, étroitement guetté cette fois, s’étendit sur sa couche. Mais on attendit vainement l’humectation purpurine. Resté exsangue depuis son effroyable hémorragie, l’avorton n’était plus apte au curieux enfantement du phénomène cutané qui jusqu’alors, à des degrés divers, s’était produit si régulièrement.

Il ne reçut aucunes libéralités.