Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/386

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

forger une coupe dans le bloc d’or ramené de la mine. Le conquérant boirait ainsi l’eau du Choaspes dans une matière déterminée qui, récemment extraite par lui même du sol de la région asservie, renforcerait la signification de son acte.

Au jour dit, devant une foule immense, un trône drapé de riches étoffes brillait au soleil en plein cœur d’Ecbatane. Cyrus y prit place auprès d’une table de marbre où se dressait la coupe d’or, remplie d’avance d’eau du Choaspes, et tous les dignitaires mèdes vinrent tour à tour faire leur soumission au nouveau maître.

Le défilé terminé, Cyrus, au milieu d’un grand silence, porta la coupe jusqu’à ses lèvres.

Mais il eut beau la renverser au-dessus de sa tête rejetée en arrière, l’eau, retenue par une force étrange, ne put franchir son gosier.

Troublé, il écarta l’objet et perçut aussitôt un cri de surprise proféré par tous : l’eau, sans tomber, pendait au-dessous de la coupe, qui, lancée au loin par Cyrus effrayé, atteignit la foule, où elle passa de main en main ; le liquide l’avait suivie dans sa chute et, glissant extérieurement au long du métal, se balançait maintenant sous