Page:Roussin - Une campagne sur les côtes du Japon, 1866.djvu/29

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bon politique qu’habile général, Taïko sut désunir les princes ; et, flattant leurs ressentiments et leur ambition, les ramener successivement à reconnaître son autorité ; puis, lorsqu’il eut entre les mains la direction de toutes ces forces auparavant désunies, il songea à les occuper à quelque expédition étrangère, où les succès, comme les revers, allaient donner un aliment à l’esprit belliqueux de la nation ; il envoya donc des armées à la conquête de la Chine, et entreprit cette guerre de Corée qui dura jusqu’à la fin de son règne (1599). Reconnaissant avoir atteint suffisamment son but, et déjà sur son lit de mort, il ordonna le rappel de l’expédition.

Le règne de Taïko fut aussi funeste aux étrangers et à leur religion qu’il l’avait été à l’indépendance des princes. Frappé par d’imprudentes révélations, le Siogoun fut amené à voir dans ces marchands semant l’or sous leurs pas, dans ces prédicateurs éloquents d’une religion nouvelle, l’avant-garde des flottes et des armées qui, de la même manière, avaient récemment conquis les plus puissants royaumes de l’Asie. Leur influence et leur nombre allaient croissant ; un incident fut le signal des proscriptions[1]. En vain quelques-uns de leurs

  1. L’évêque du Japon, croisant un jour dans son palanquin le cortége d’un des principaux ministres, refusa de s’écarter de son passage suivant la coutume du pays, et affecta même d’occuper la plus grande partie de la route.