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ix
préface


que témoignages désintéressés, où la personnalité du narrateur paraît le moins possible et où il n’a à chercher aucun avantage devant la postérité. Mais qui donc ne s’efforce à se guinder, à se rendre intéressant et pourquoi, sans ce mobile, écrirait-on ? Même lorsqu’on est soi-disant écrire pour soi seul et pour ses enfants, ne cherche-t-on pas à prendre une attitude et à se donner une contenance ? Il faut donc, à mon goût, demander aux mémorialistes plutôt l’atmosphère où les événements se produisent que leur précision ; des traits de caractère qu’ils ont jetés çà et là sans prétention et parce que leur imagination en avait été frappée ; des mœurs, des formes de costume, des indications d’habitudes. Même se faut-il méfier des questions, des réponses, des paroles, à moins qu’elles ne jaillissent des circonstances, qu’elles ne soient rapportées, semblablement ou à peu près, par quelque autre témoin, à moins qu’on n’en trouve l’écho en des lettres ou en des journaux. Sous ces réserves, il y a vraisemblance qu’on puisse avoir chance de ne pas être entièrement trompé ; mais il y aura toujours trop de déve-