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PARIS

git le corps… » il n’y est pas. On ne pouvait pas parler de son âme ; ses contemporains en doutaient, et lui-même ne croyait pas en avoir une ! Mânes est bien le mot qui convenait, si l’on a voulu rappeler les divinités infernales que l’antiquité païenne désignait sous ce nom !

Un des charmes du Panthéon, c’est la solitude qui l’entoure, et qui règne même il l’intérieur. En face, s’ouvre pourtant l’École de Droit dont la jeunesse est bruyante ; mais une vaste place sépare les deux édifices, et le bruit de l’École n’arrive pas jusqu’aux sacrés parvis — que les élèves ne fréquentent guère d’ailleurs.

J’y suis entré plusieurs fois, et je n’y ai jamais rencontré personne — sauf deux anglais qui tenaient à voir le tombeau de Voltaire, et à faire toucher leurs bagues aux restes du grand homme. Le guide n’hésita pas à leur affirmer qu’ils avaient sous les yeux le corps du plus grand génie que la France ait produit.

Sainte Geneviève était une humble fille qui n’aimait pas le bruit, et peut-être se plaît-elle au silence qui l’entoure. Mais non, elle avait trop à cœur la gloire de Jésus-Christ, et sans doute elle s’attriste de voir ses autels déserts !

C’est au Panthéon surtout que peuvent s’appliquer avec vérité ces vers d’Auguste Barbier :

Car les saints monuments ne restent dans ce lieu
Que pour dire : autrefois, il y avait un Dieu !