Page:Routhier - À travers l'Europe, impressions et paysages, Vol 1, 1881.djvu/25

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à la lettre la parole de l’évangile, en transportant des rochers énormes d’un lieu dans un autre !

On représente ordinairement Saint Patrice une harpe à la main. Était-il lui-même un de ces bardes qui furent les pères de la poésie celtique, et dont l’antique Hibernie est fière ? Les obscurités qui entourent son histoire ne permettent pas de l’affirmer. Mais ce qui est moins incertain c’est qu’il a dû connaître Ossian.

M. Ernest Hello va plus loin et dit :

« Le barde irlandais finit, dit-on, par christianiser sa harpe guerrière. L’Homère de l’Hibernie inclina ses vieux héros devant l’étendard du Dieu inconnu. La poésie celtique demanda aux monastères, qui sortaient du sol foulé par Patrice, leur ombre hospitalière. Alors, dit un vieil auteur, les chants des bardes devinrent si beaux que les anges de Dieu se penchaient au bord du ciel pour les écouter. »

Saint Patrice était un enfant de la vieille Armorique, aujourd’hui la Bretagne. Irlandais et Bretons sont frères. Il y a dans le caractère des deux peuples des ressemblances nombreuses, qui se retrouvent dans leurs mœurs et leur génie poétique.

Quand on lit les chants qui nous restent d’Ossian, on a peine à croire que treize siècles et la vaste mer le séparent de Brizeux. Entre le fils de Fingal et le barde d’Arvor la parenté est frappante.