Page:Routhier - À travers l'Europe, impressions et paysages, Vol 1, 1881.djvu/321

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prêché une saine morale ? L’histoire est encore là pour répondre, et vous montre le tableau des mœurs qui suivirent et d’où est sorti le XVIIIe siècle.

Mais au moins, me dira-t-on, si le théâtre, tel qu’il était au temps de Molière et tel qu’il est aujourd’hui, ne corrige pas les mœurs, il corrige les ridicules et perfectionne les manières ? Il y a là du vrai ; mais encore le résultat obtenu est-il mince, et, le plus souvent, les ridicules corrigés sont remplacés par d’autres.

Molière, on le sait, a souvent châtié les médecins ; il s’est spirituellement moqué de leur fausse science ; mais les a-t-il corrigés ou rendus plus savants ? La Faculté elle-même admettra, qu’après les deux siècles de progrès qui la séparent de Molière, elle n’a pas encore pu approfondir tous les mystères du corps humain. Il parait qu’il lui en reste encore quelques-uns à sonder, et j’imagine qu’elle aurait encore quelque peint ; à expliquer pourquoi la fille de Cléante était muette. Il est vrai qu’aujourd’hui ce phénomène — une fille muette — est devenu très rare.

Passons, si vous le voulez, à une autre classe d’hommes, les avocats. Quand vous lisez aujourd’hui les Plaideurs de Racine ne vous arrive-t-il pas de dire spontanément : Oh ! comme c’est bien cela ? Or pourquoi poussez-vous ce cri involontaire, si ce n’est parce que vous retrouvez encore au Palais des types comme les avocats de Racine ? Sur ce chapitre vous m’en croirez peut-être, je connais les avocats, et je puis vous certifier que Racine ne les a pas corri-