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PARIS

ne peut presque rien contre le nombre, je peindrais le Paris officiel, règnant et gouvernant par la volonté aveugle du suffrage universel. Vous y verriez quelques grands comédiens qui se drapent dans leurs phrases, qui se donnent des attitudes, et qui s’emparent de l’influence par l’intrigue et par l’exploitation des préjugés et des intérêts. Ambitieux habiles, n’ayant ni principes religieux ni autres, mais parleurs infatigables possédant une rare facilité d’évolution, des élans factices et une verve insolente. Espèces de phonographes vivants, chargés de mots jusqu’à la gueule, et que le peuple s’amuse à mettre en mouvement.

À côté du bourgeois laborieux et économe, qui mène une vie honnête et souvent même très chrétienne, je vous représenterais le bourgeois indifférent, ou à demi libre-penseur, républicain très avancé, mais qui se rallie au parti de l’ordre et devient même clérical, lorsque la Commune triomphe. Il faut alors l’entendre : « le scepticisme railleur, c’est bien joli et surtout peu gênant ; mais enfin, il faut des principes… Il y a de la vérité en ce monde… et puisqu’il y a un Dieu, il faut qu’il y ait une religion… Moi, je veux qu’on respecte la religion, et même… ses ministres. Malheureusement le respect, cette grande chose, oui… le respect s’en va… il est parti… Après tout, le Comte de Chambord n’est pas si impossible qu’on le dit… Il prêche un peu trop, c’est vrai, mais il y a du bon dans ce qu’il prêche… »

Si le danger pour la caisse continuait, ce type de bourgeois se ferait légitimiste. Mais voici que la Commune est vaincue, et qu’un gouvernement régu-