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ce capitale qui assure la sécurité à tous les titres de propriété et de créances hypothécaires.

Avec ces grands travaux législatifs, marchaient de pair le creusement des canaux, la construction des chemins de fer, et des ponts, le Grand Tronc, l’Intercolonial, le pont Victoria, et cent autres entreprises nécessaires au progrès matériel.

Mais plus notre pays grandissait et s’enrichissait, et plus il devenait urgent de le protéger, et Sir Georges établit une milice, au risque de perdre le pouvoir. Il le perdit en effet à cause de l’impopularité de cette mesure, mais il le reprit et la milice fut maintenue. Ce qui ajoute beaucoup au mérite de notre grand Canadien, c’est que toutes ses œuvres étaient combattues avec acharnement, non seulement par le Haut Canada, sous l’Union, mais aussi par des adversaires de sa province, qui lui faisaient une guerre implacable.

Ses luttes mémorables contre le Haut Canada, représenté par Georges Brown qui était un terrible lutteur, ont duré quinze années. À la fin, elles étaient devenues plus ardentes, et dans ses prévisions d’avenir il comprit que l’Union des deux Canadas ne pouvait plus durer.

Mais le problème était de savoir quel régime pourrait remplacer cette union sans compromettre l’avenir de notre province et son autonomie.

Cartier considéra longtemps cette question sur toutes ses faces, et dès 1858 il alla lui même en Angleterre, avec ses deux collègues Galt et Ross, pour proposer au gouvernement impérial la Confédération des provinces de l’Amérique Britannique du Nord.

Le projet fut ajourné et la lutte, entre les deux provinces continua. En 1864, elle était devenue intolérable, et un ministère de coalition fut formé pour remettre à l’ordre du jour le projet d’union fédérale.

On le discuta pendant un mois en parlement, et il fut adopté au printemps de 1865. Mais le nouvel ordre de choses ne fut définitivement établi par statut impérial qu’en 1867.

On reconnaît assez généralement que les principaux auteurs de cette grande œuvre ont été Sir John A. Macdonald, Sir Charles Tupper, et Sir Georges É. Cartier.

Mais les deux premiers ont déclaré, sans fausse modestie, que sans Cartier la Confédération n’aurait pu être faite. Car lui seul pouvait faire accepter le nouveau régime par la province de Québec, et ce fut pour lui une immense responsabilité.

Dès le début des pourparlers il se déclara un adversaire de l’Union législative, et quand ses collègues voulurent la lui imposer il menaça de tout briser. Finalement il leur fit accepter le système fédératif, le seul qui pouvait nous garantir l’autonomie provinciale dans toutes les questions concernant notre religion, l’instruction publique, notre langue, et nos lois civiles françaises.

Avec la rectitude de jugement qui le distinguait, Cartier n’a jamais connu l’incertitude, ni l’irrésolution ; et quand, après étude et réflexion, il avait pris sa détermination il ne doutait plus de rien. Sa certitude d’avoir raison faisait sa force, et si on lui avait dit : « Tout le monde est contre vous, » il aurait répondu : « Eh ! bien, tout le monde a tort. »

Dans ses vastes conceptions la Confédération devait englober tous les territoires, et s’étendre de l’Atlantique au Pacifique. L’Ouest, c’est l’avenir, disait-il.

Aussi retourna-t-il à Londres dès le printemps de 1869 pour négocier avec la Cie de la Baie d’Hudson et le gouvernement impérial l’acquisition des Territoires du Nord Ouest.

Sa mission fut couronnée d’un plein succès, en dépit des obstacles. C’est à cette occasion que l’illustre Gladstone fit son éloge dans un banquet, et l’appela l’homme légion. Ce qualificatif était bien trouvé ; car Sir Georges était vraiment légion, puis-