Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/141

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nant son coutelas de la main droite, il traça d’un geste rapide un cercle sanglant autour de la tête de sa victime et arracha violemment son horrible dépouille.

Puis, tirant de sa poche un mouchoir d’indienne rouge il le lui offrit pour se panser.

Le malheureux Cris qui avait porté ses deux mains à sa tête pour y retenir la peau qui descendait, se rendit au ruisseau, et le Pieds-Noirs l’aida à se laver et à s’envelopper la tête dans son mouchoir.

Les deux guerriers se rassirent en silence, et le Pieds-Noirs proposa de dîner.

Tous deux mangèrent avec appétit et fumèrent ensemble le calumet de paix.

Alors le Pieds-Noirs dit au Cris : « Je ne veux pas te laisser ainsi sans armes pour te défendre et te nourrir : voici ton fusil et tes munitions que je te rends ».

— Est-ce bien à moi ? dit le Cris, avec un éclair de joie.

— Certainement.

— Eh ! bien, alors, je veux jouer encore.

Et le jeu reprit avec acharnement.

Cette fois, enfin, la chance tourna et le Pieds-Noirs se mit à perdre. Tout ce qu’il avait gagné passa bientôt en la possession du Cris et jusqu’à ses propres armes et ses vêtements.

Comme le Cris il mit alors au jeu sa propre chevelure et la perdit dans la même opération sanglante.