Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/204

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dit Alexis. (Cette expression employée par les Sauvages et les Métis signifie camper dans un endroit où l’on peut allumer du feu et faire un dîner chaud.)

— Et moi aussi, dit le missionnaire ; car je commençais à traîner mes raquettes, et je me sens un grand vide à l’estomac.

— Oui, j’ai remarqué que vos jambes faiblissaient, Père ; mais vous allez retrouver vos forces dans une bonne chaudière de pemmican.

— Crois-tu que nous puissions rejoindre nos gens demain, Alexis ?

— Certainement, car ils ne peuvent pas aller vite avec des femmes, des enfants et des bagages.

Et tout en continuant de causer, l’on s’organisa pour la nuit. On détela les chiens. On tira du traîneau les provisions, les ustensiles, les couvertures ; et pendant que la marmite, suspendue au-dessus du feu bouillait et chantait ce petit air qui réjouit l’oreille de celui qui a faim, on suspendait auprès du feu pour les faire sécher les vêtements mouillés par la neige, et l’on ramassait des branches pour en faire des lits, sur lesquels on étendait les couvertures.

Enfin, on soupa de bon appétit ; puis à demi-couché sur son lit de branches chacun commença à fumer.

Les deux amis étaient redevenus muets. Le grand silence de la nature n’était rompu que par les craquements des arbres, et les pétillements du feu.