Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/327

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à voir en détail. Les Chinois s’entendent peu à faire valoir leur marchandise, et ne se donnent aucun mal d’étalage ; mais ils savent vendre ; et convaincus que l’on va marchander ils demandent toujours le double du prix marqué ce qui leur permet de réduire tout en faisant un joli profit. Ils sont du reste polis, aimables et d’une patience que j’envie, ne se lassant jamais de répéter pendant des heures la même monotone histoire. Ils ont leurs propres fournisseurs où ils se procurent des produits chinois et japonais importés, et détaillés par des compatriotes, ce qui leur donne presque l’illusion d’avoir transporté en Colombie, un petit coin de leur Chine ou de leur Japon. Chez un fruitier japonais j’ai vu des légumes étranges, entassés dans d’immenses paniers, à côté de verdures louches, et de salades douteuses ; à terre, des barils remplis d’un liquide huileux où il marinait des viandes et des gibiers sans forme ni couleur, toutes douceurs inconnus aux mangeurs de rosbif. Pourtant ce n’est rien que de voir cet étalage sans nom ; c’est l’atmosphère de la boutique qui est insupportable.

Une buée chaude, fade, lourde, suffoquante, remplit l’air, et nous force à disparaître brusquement, pendant que ces bons Chinois, ahuris de notre excentricité, continuent de causer dans la pièce à l’odeur énervante. Pourtant, chez les autres, ils sont d’une propreté parfaite, et dans la plupart des hôtels et cafés ils sont