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LE CENTURION

Je viens d’être témoin du plus grand des prodiges. Lazare, mort et enterré depuis quatre jours, est aujourd’hui vivant ! J’en suis encore toute énervée, et je me sens incapable de vous raconter comme je le voudrais cet événement extraordinaire.

Laissez-moi seulement noter mes impressions.

À mon arrivée à Béthanie, j’ai trouvé les choses telles que Nicodème me les avait décrites.

C’était un spectacle lamentable. Dans la chambre supérieure, toute tendue de noir, les deux sœurs en longs vêtements de deuil se tenaient renfermées, et n’en sortaient que deux fois le jour pour aller au tombeau.

Le reste du château était ouvert comme une demeure abandonnée, et tous les voisins, parents, amis, et curieux, y circulaient en poussant des exclamations de douleur et des gémissements.

Je fus admise dans la chambre haute, et j’y trouvai mes deux amies dans un accablement voisin du désespoir. C’est qu’elles ne souffraient pas seulement d’avoir perdu leur frère. Ce qui doublait leur souffrance, c’était de penser que leur ami, le grand Prophète, paraissait les avoir abandonnées. Myriam était muette de douleur, et laissait parler Marthe, qui se plaignait de l’oubli du Maître avec amertume.

Je ne pouvais que leur exprimer toutes mes sympathies, et celles de ma sœur Claudia, et je redescendis me mêler à la foule.

Plusieurs pharisiens étaient là. Sous prétexte de sympathie à la famille affligée ils blâmaient