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LE CENTURION

Il savait donc qu’en répondant à Caïphe : « Je le suis, » il allait prononcer sa sentence de mort. Mais il ne pouvait, ni ne devait se taire. Cette question ne pouvait pas rester sans réponse.

C’était pour la dire, cette grande parole, qu’il était venu dans le monde. Et cette mort qu’elle allait lui mériter, c’était pour la subir qu’il avait revêtu notre humanité.

Sans doute, il savait aussi que ni Caïphe ni ses autres juges ne croiraient à sa parole. Mais ce n’était pas à eux qu’il allait l’adresser ; c’était à toutes les âmes de bonne foi ; c’était aux siècles à venir, et à toutes les nations du monde.

Aussi n’eut-il pas un moment d’hésitation ; et regardant ses juges en face, sans forfanterie ni terreur, sur le ton solennel et serein qui convient aux paroles divines, il répondit : « Je le suis ».

Et pour mieux accentuer le sens de sa réponse, si claire par elle-même, il s’appropria les paroles que le prophète Daniel applique au Messie, en ajoutant : « Vous verrez le Fils de l’Homme assis à la droite de Dieu le Père, descendant sur les nuées pour juger le monde ».

Horrifié par cette réponse, Caïphe déchira ses vêtements, et s’écria : « Vous avez entendu son horrible blasphème ! Il mérite la mort ».

Ce fut l’avis de tous. Mais ce n’était pas assez de l’avoir déclaré coupable et digne de mort. Le pouvoir d’infliger la peine capitale n’appartenait qu’au Procurateur. Et puis, c’était encore la pleine