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LE CENTURION

— Alors, répliqua Pilatus, prenez-le vous-mêmes, et le crucifiez ; car pour moi, je ne trouve aucun crime en lui.

Mais les Sanhédrites savaient bien qu’ils n’avaient aucun droit de crucifier Jésus sans une sentence du gouverneur. Et quand ils virent qu’il persistait à la refuser, malgré leur dénonciation formelle que l’accusé s’était déclaré roi des Juifs, et se révoltait ainsi contre Rome, ils en revinrent à leur première accusation de blasphème. — Nous avons une loi, lui dirent-ils, et d’après notre loi il doit mourir, parce qu’il s’est fait Fils de Dieu.

Cette évocation de la loi juive augmenta les frayeurs de Pilatus. Car il se rappela les instructions qu’il avait souvent reçues de Rome. Plusieurs fois déjà, il avait méprisé cette loi, et fait exécuter des ordres qui la contredisaient. Mais il avait alors été blâmé à Rome, et réprimandé. C’était même avec beaucoup de peine qu’il avait réussi à empêcher son rappel.

Et voilà qu’on le menaçait encore d’un conflit avec la loi juive.

Si vraiment Jésus se disait Fils de Dieu, pouvait-il, lui, empêcher la loi juive d’avoir son cours, et s’exposer à être encore dénoncé à Rome ?

Pilatus fit de nouveau rentrer Jésus, et lui dit : « D’où es-tu ? » Il espérait sans doute que Jésus lui révélerait une origine purement humaine, et répudierait toute prétention à une filiation divine.