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la mort du christ

Souillait sa barbe blonde et ses lèvres divines,
Or, filtrant à travers sa ronronne d’épines,
Goutte à goutte tombait sur son cou déchiré !
Mais en vain son visage était déiiguré.
Et prenait des douleurs l’expression funeste :
Il rayonnait encor d’une empreinte céleste !
De ses membres divins disloqués et broyés,
Un sang pur, ruisselant à flots multipliés,
Inondait les replis de sa chair virginale :
Le roi des rois n’eut pas d’autre pourpre royale !

Le tigre à ce spectacle eut eté désarmé
Mais ces cœurs, où de Dieu la haine avait germé,
Ne pouvaient contre lui rassasier leur rage ;
Aux tourments du supplice ils ajoutaient l’outrage.
Et le Christ blasphémé par tous ces furieux
Ne les foudroyait pas d’un éclair de ses yeux !

Abandonné de tous, seul entre ciel et terre,
Il allait consommer son plus profond mystère.
Trait d’union sublime, il allait réunir
Ce qui dure toujours et ce qui doit finir,
L’Être par excellence avec la créature,
La vie avec la mort, la Grâce et la nature !
Et ce lien de l’homme à la Divinité,
Durera dans le temps et dans l’Éternité !