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Marianne : « Baptiste ! qu’a m’dit, puisque c’t’affaire-là te tourne le sang, va don’ trouver un avocat, et pis, contes-y tout ; tout au long. J’voulais l’envoyer à ma place parc’que les femmes y savent mieux parler qu’nous, histoire de s’exercer d’avantage, mais elle a pas voulu. Fallait qu’à fisse son savon, aujourd’hui, sans faute. Alors, j’ai attelé la rougette et j’sui v’nu.

l’avocat. Et vous avez bien fait. Voyons ! avec qui avez-vous eu un différent ?

baptiste. C’est avec mon voisin, Poléon Lalonde ; un’ vraie peste, un grand noiraud, avec un nez crochu, des yeux perçants ; si vilain, qu’on dirait l’yâble !

l’avocat. Enfin votre voisin… (déclamant). « Ce nom aurait suffit, sans ce torrent d’injures »… Je pense que ce n’est pas à cause de sa laideur que vous lui en voulez ? Que vous a t-il donc fait ?

baptiste. Des misères ! des misères ! qu’c’est à n’pas l’croire !

l’avocat. Quelques discussions : vous aurait-il injurié ?

baptiste. (d’un ton digne.) Ma foi, non, on s’parle pas.

l’avocat. Des voies de faits, alors ; c’est plus sérieux. Ainsi il vous a battu ?

baptiste. (fièrement.) Battu, moé ! J’aurais voulu voir ça ! J’suis l’homme qu’a pas frette aux yeux et capable de s’faire aller ! (En parlant ainsi, il a déposé son panier, fait des poses de boxes, comiques, et reprend son panier.)

l’avocat. Il faut donc écarter les coups, blessures, et sévices graves ! c’est dommage.

baptiste. Marci d’moi, m’sieu l’avocat ; Je n’tiens pas a avoir été battu !

l’avocat. Ce que j’en disais c’était pour les besoins de la cause. Il vous a peut-être dérobé quelque objet ? Ah ! s’il pouvait y avoir vol avec effraction dans une maison habitée ! Le cas serait plein de ressources.