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EN ROUTE POUR LE NORD-OUEST

rendait l’âme, le 6 décembre 1746, après quelques jours de maladie.[1] M. Pierre Gautier de Varennes avait alors soixante et quatre ans révolus. Malgré cet âge qu’il portait allègrement ; malgré toutes les fatigues endurées dans ses voyages sans compter les misères et les dégoûts dont ses envieux ou ses ennemis n’avaient cessé de l’abreuver ; malgré le peu de profit financier qu’il en avait retiré, l’intrépide Canadien, une semaine avant son trépas, songeait encore à organiser une nouvelle expédition pour l’Ouest.

« De Varennes, le pauvre grand découvreur du Nord-Ouest, fut l’une des gloires les plus rayonnantes du Canada, » a écrit l’une de nos plus belles plumes de romancier, muette maintenant[2], et une autre, celle d’un historien, le glorifie par ces mots : « Deux figures se détachent au-dessus de toutes les autres dans la galerie des personnages que l’histoire nous présente comme les fondateurs du Canada : Samuel de Champlain, et de la Vérendrye… le second arrivé sur la scène un siècle plus tard découvrit et fonda le nord-ouest. L’œuvre de chacun d’eux a été définitive en ce sens qu’elle n’a pas été interrompue par leur mort. Une fois leurs travaux accomplis ils se sont couchés dans la tombe heureux et triomphants[3]

Comme l’illustre fondateur de Québec, Gautier de Varennes ambitionnait de découvrir de nouvelles contrées pour les livrer à la civilisation, et pour le roi de France.

Joseph prévint aussitôt son frère aîné, François de la Vérendrye, de la mort de leur père.

François reçut la triste nouvelle à Michilimakinac où il s’occupait de l’achat des approvisionnements des forts. Craignant d’être supplanté par les ambitieux dans les postes de l’Ouest, il se rendit en toute hâte à Montréal, afin d’y faire valoir ses droits à la succession de son père[4]. Mais tout avait été réglé autrement. Vers le milieu du mois de février 1750, le sieur Le Gardeur de Saint-Pierre avait été nommé en remplacement du père de Joseph, pour le voyage projeté.

Quand les deux jeunes gens se présentèrent à M. de Saint-Pierre, ils n’en furent pas bien reçus, et celui-ci ne voulut prendre avec lui que M. de Noyelles.

Cela ne faisait point le compte des deux amis.

François de la Vérendrye avait usé de tous les moyens pour obtenir la direction de l’expédition, mais n’avait pu y réussir. On voulait garder à Montréal les trois fils de la Vérendrye, pendant que de St-Pierre serait là-bas, dans l’Ouest.

La saison s’avançait. François devait s’occuper des vivres et provisions des hommes à son service sous peine de les voir périr, et devait attendre leur retour pour ne point les laisser piller et abandonner.

Ce fut à grand peine que François obtint la permission d’aller au-devant de ses gens ;[5] Joseph l’accompagna, tandis que Pierre

  1. Rapport sur les Archives du Canada, 1887, page clii.
  2. Joseph Marmette.
  3. B. Sulte. Hist. des Can. Français, vol. VI.
  4. Abbé G. Dugas. L’Ouest Canadien, p. 123.
  5. Abbé G. Dugas. L’Ouest Canadien, p. 127.