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EN ROUTE POUR LE NORD-OUEST

de Noyelles, avec les gens de M. de St-Pierre, devaient le rejoindre peu après.

Chaque printemps, un nombre considérable de canots d’écorce partaient de Ville-Marie pour l’Ouest, allant faire la traite des pelleteries avec les sauvages, mais il n’y avait jamais eu autant de monde, sur la plage ou sur les quais de la ville pour voir partir ces immenses flottilles que le 5 juin 1750, à l’occasion du départ de M. St-Pierre et ses gens, comprenant une compagnie des troupes détachées de la marine du Canada, et dont il était capitaine.

Tout Montréal était sorti ; et au bruit des acclamations de la foule les canots d’écorce s’élancèrent gaiement.

L’embarcation que montait M. de Noyelles était d’environ trente-quatre pieds de long, de trois pieds de profondeur et cinq de large ; elle portait une charge de la pesanteur de deux tonneaux, et avait pour équipage huit hommes, tous hardis nageurs.

Voici comment on voyageait sur nos lacs et nos rivières en ce temps-là : À tous les deux milles on arrêtait quelques minutes pour fumer, et quand on faisait un portage, c’est-à-dire lorsque la navigation était interrompue par un rapide ou une chute, il fallait atterrir ; alléger le canot ; et les hommes, à terre ou dans l’eau, le remorquaient jusqu’à ce que le rapide fût passé ; ou bien, on le portait sur les épaules jusqu’à l’endroit le plus rapproché d’où il était possible de continuer la route.

On n’arrêtait pas pour se faire sécher, mais on continuait sans relâche jusqu’à l’heure du repas ou du coucher, et quand il y avait un portage à faire il était désigné par le nombre de repos ou d’arrêts qu’il fallait faire avant de le franchir.

Toutes ces choses intéressaient fort M. de Noyelles. Chaque jour lui présentait quelque chose de nouveau.

Mais ce n’était là qu’un commencement, et bien d’autres choses devaient l’étonner en chemin.

À la vue d’une croix tombale, quand un cours d’eau était franchi ou qu’un autre commençait, les voyageurs ôtaient leurs coiffures et se signaient, pendant qu’ils disaient une courte prière.

Ensuite, les avirons nageaient en cadence sous le rythme des beaux chanteurs de l’expédition.

On chantait :

Dans mon chemin j’ai rencontré
Trois cavaliers fort bien montés,
 Lon, lon, loridon, deine,
 Lon, lon, laridon, dai.

Et tous reprenaient en chœur :

Lon, lon, etc.

Ou bien :

Quand j’étais chez mon père, (bis)
Petite et jeune étions,
 Dondaine et don,
Petite et jeune étions,
 Dondaine.