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Page:Roze - Histoire de la Pomme de terre, 1898.djvu/115

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SON INTRODUCTION EN EUROPE 101

ajoute que ceux que l’on fait sécher au soleil s’appellent Chunno ».

Jean Bauhin termine son article en assurant que « la plante que Gaspard Bauhin dit être nommée Artichaut des Indes par les Bourguignons est très différente du Pappa d’Amérique ou de son Solanum tuberosum esculentum »[1].

Si nous essayons de résumer les observations de ces savants descripteurs, nous constaterons d’abord la petitesse primitive des tubercules à pelure rougeâtre des Pommes de terre cultivées pour la première fois sur le continent européen, puis l’augmentation sensible du volume de ces tubercules après un demi-siècle, leur production quoique petits en nombre d’abord considérable (près de 50 par pied), la haute dimension des tiges (deux mètres), puis la floraison abondante, la couleur violacée ou blanche des corolles, et la formation initiale de beaucoup de fruits avec nombreuses graines, tous les caractères enfin qui dénotent une plante presque sauvage, de végétation vigoureuse, mais s’adaptant fort bien aux nouveaux climats qu’elle trouvait en Europe. D’un autre côté, nous prendrons note d’une allégation toute nouvelle et bien inattendue, sur laquelle, du reste, nous aurons à revenir dans le Chapitre suivant, c’est l’indice même de la première réprobation dont a été frappée la Pomme de terre et qui ferait croire qu’elle a eu assez d’influence pour retarder l’essor que devait prendre la culture du précieux tubercule.

Mais revenons à l’histoire de l’introduction de la Pomme de terre en Europe. Nous avons vu qu’elle s’était faite en Angleterre d’une façon toute spéciale : nous n’avons pas trouvé de documents qui permettent d’établir qu’elle ait été, au commencement du XVIIe siècle, importée de l’Angleterre dans les autres États européens. Par contre, Charles de l’Escluse nous a appris qu’elle avait été apportée d’Italie en Belgique par un Légat du Pape, et que des Pays-Bas elle lui avait été envoyée en Autriche, puis, que lui-même avait contribué à la répandre en Allemagne. Les Frères Bauhin nous ont fait connaître à leur tour qu’ils la possédaient en Suisse, et que de là elle avait été importée dans la Bourgogne, qui est devenue successivement la Franche-Comté, c’est-à-dire une partie de la France


  1. — Peut-être s’agirait-il en ce cas du Topinambour qui a été introduit en Europe vers l’année 1616, en provenance du Canada.