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156 HISTOIRE DE LA POMME DE TERRE

non : si les pommes ne sont pas grosses, s’il s’y trouve des yeux en grand nombre, si, dans certaines espèces, ils sont si enfoncés qu’on ne puisse pas si bien les séparer seuls, alors on est bien obligé de faire autant de morceaux qu’il y a d’yeux ; mais si les pommes sont grosses, et qu’on veuille en profiter encore pour la nourriture, on en sépare ou excave les yeux, comme ceux des pommes ou poires : on les plante souvent de la grosseur d’un pois, et ils produisent autant, et s’ils sont tirés de gros fruits, d’aussi grosses pommes que les morceaux, les pommes même entières.

» On a poussé cette invention encore plus loin. Lorsqu’on a des pommes unies, lisses, sans excressences ou inégalités, on en coupe la peau de l’épaisseur d’une ligne ou plus, de manière que l’œil ne soit point blessé ; on coupe ces tranches de peau en autant de morceaux qu’il s’y trouve d’yeux, et on les plante avec le même succès.

» Graine. Il y a plus de 20 ans que, remarquant tant de boules de graine aux plantes des Pommes de terre, je demandai aux cultivateurs si l’on ne s’en servoit point pour en semer la graine ; on me dit que non… Les Anglois qui se sont avisés depuis peu de semer de la graine des Pommes de terre, n’ont d’autre but que de les renouveler, par la réflexion que toute plante, légumes, bleds, etc., dégénèrent peu à peu, et qu’il y faut remédier par de la nouvelle graine ; or, se proposant d’acquérir par là des plantes plus vigoureuses, des fruits plus gros, plus parfaits, plus sains et de meilleur goût, il est incontestable que pour atteindre ce but, il faut semer une graine qui le soit de même, celle qui est faible, légère, mal mûre, ne sauroit faire cet effet, encore moins celle qu’on tire par lavage du marc des boules de graine.

» Tems de planter… On me conseilla de planter des Pommes de terre en Automne. J’en voulus faire l’essai : j’en plantai quelques-unes, par quatre fois, pendant tout le cours de Septembre 1771 ; elles poussèrent de belles tiges le printemps suivant et furent vigoureuses pendant tout l’été. Je me flattai d’avoir réussi, et pour n’y rien déranger, je n’y touchai point pendant tout ce tems. En Octobre je voulus faire ma récolte. Quelle surprise pour moi de n’y point trouver, non seulement les pommes plantées (car on ne les retrouve jamais, puisqu’elles servent à former les racines et les nouveaux fruits), mais point de fruits de l’année, que je supposois