Aller au contenu

Page:Roze - Histoire de la Pomme de terre, 1898.djvu/460

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
446
HISTOIRE DE LA POMME DE TERRE

choisis dans les différens ordres[1]. Le dîné fut gai ; et si, comme on l’a souvent avancé sans preuves, nos racines sont assoupissantes, lourdes et indigestes, elles produisirent sur les convives un effet absolument contraire. C’est ainsi, je crois, qu’il faut s’y prendre, quand on veut combattre avec quelque succès les préjugés toujours prêts à s’armer contre les objets utiles, aussi bien que contre les nouveautés agréables.

« Cuisson des Pommes de terre. — Le procédé de cuire les Pommes de terre à la vapeur de l’eau bouillante peut s’exécuter facilement… Il suffit que le vaisseau qui contient les objets ne touche point à l’eau, et que la vapeur de ce fluide en ébullition y arrive fort chaude : ce vaisseau pourroit bien être tout simplement un panier d’osier qui entreroit dans une marmite à quelque distance du fond et des parois : quand les Pommes de terre seroient cuites, on pourroit les retirer au moyen de deux anses aussi d’osier attachées au rebord du panier. Déjà nos femmes de marché vendent ces racines comme des châtaignes, après les avoir fait cuire à la vapeur de l’eau, au moyen d’une claie ou d’un grillage placé au-dessus de l’eau dans le chaudron garni d’un couvercle qui ferme exactement[2].

» Usage des Pommes de terre non mûres. — Il arrive souvent que le besoin ou l’amour des primeurs font arracher les Pommes de terre avant qu’elles ne soient parfaitement mûres, et qu’on les

  1. — « En 1775 ou 1776, disait Bosc (en 1822), Parmentier a donné un grand dîner, auquel j’ai participé, dans lequel il ne fut servi que des Pommes de terre, même pour boisson ». Nous devons regretter que Bosc, non plus du reste que Parmentier, ne nous ait pas fait connaître le menu de ce dîner historique. Nous pourrions essayer de le reconstituer en admettant d’abord que le pain y était remplacé, à la mode anglaise, par des Pommes de terre cuites à la vapeur, et le vin par une solution aqueuse d’eau-de-vie de Pommes de terre. Nos recueils de préparations culinaires nous enseignent plus de vingt manières différentes de préparer le précieux tubercule. Il est à penser que Parmentier, comme il nous le laisse entendre, devait être au courant de plusieurs de ces préparations. Si l’on y joignait le potage à la purée de Pommes de terre, la salade de Pommes de terre, et comme dessert le gâteau de Pommes de terre, puis les biscuits et le Gâteau de Savoie, dans lesquels la fécule de Pommes de terre joue un grand rôle, on voit qu’il n’était pas difficile de composer un menu, auquel on n’aurait pu guère reprocher que de convenir à un véritable dîner de carême.
  2. — Cette vente de Pommes de terre cuites paraît avoir été remplacée actuellement par celle des Pommes de terre frites.