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Page:Roze - Histoire de la Pomme de terre, 1898.djvu/87

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SON INTRODUCTION EN EUROPE 73

» Pierre Cieça, dans sa Chronique, imprimée en 1553, nous apprend, chap. XI, p. 49, que les habitants du Quito et des environs possèdent, outre le Maïs, une racine tubéreuse qu’ils mangent et qu’ils appellent Papas, Clusius croit que c’est la plante qu’il a reçue des Flandres, et cette conjecture a été confirmée par les voyageurs qui ont, depuis cette époque, visité la contrée.

« Nous pouvons donc parfaitement inférer de ces renseignements que la Pomme de terre a été d’abord apportée en Europe des parties montagneuses de l’Amérique du Sud, aux environs de Quito, et que les Espagnols, étant alors les seuls possesseurs de cette contrée, il n’est guère douteux qu’ils ne l’aient premièrement transportée en Espagne. Mais comme il a dû se passer un certain temps avant que l’usage s’en fût répandu chez eux et que les Italiens en vinssent à la connaître assez pour lui donner un nom[1], il y a quelque raison de croire qu’on la possédait depuis plusieurs années en Europe, avant qu’elle ait été envoyée à Clusius.

» Dans l’Amérique du Sud, on appelait le tubercule Papas, et dans la Virginie Openhawk le nom de Potatoe lui était ici évidemment appliqué en raison d’une certaine ressemblance qu’elle avait avec la Batate ou Patate douce, et notre Pomme de terre parait avoir été distinguée de cette dernière plante par la dénomination de Patate de Virginie (Potatoe of Virginia), depuis l’année 1640, si ce n’est plus anciennement.

» Quelques auteurs ont assuré que la Pomme de terre avait d’abord été découverte par Sir Francis Drake, dans les mers du Sud, et d’autres qu’elle avait été introduite en Angleterre par Sir John Hawkins ; mais, dans les deux cas, la plante à laquelle ils faisaient allusion était évidemment la Batate ou Patate douce, dont on a fait usage en Angleterre comme d’une friandise, longtemps avant l’introduction de notre Pomme de terre : on l’importait en grande quantité de l’Espagne et des Canaries et on lui attribuait la vertu d’être un très bon reconstituant. Les sucreries de Falstaff[2] et autres confiseries de qualités semblablement imaginaires, dont s’amu-

  1. — « Taratoufli veut dire aussi Truffes ».
  2. — « Let in rain potatoes, and hail kissing comfits… » Pleuvez, Patates, qu’il tombe une grêle de dragées… (Les Joyeuses Commères de Windsor, de Shakespeare, Acte V, Scène 5).